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Safdi HAMMADI (Partie 1)

Ancien combattant marocain
Né en 1926
Engagé en 1947
Arrivé en France en 1998

Safdi HAMMADI (Partie 1)
Safdi HAMMADI (Partie 1)
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Les séquences

Interviewer : Joël Guttman
Traducteur : Aziz Jouhadi
LieuALIFS, Bordeaux
Date : 23 mars 2009

Présentation

Dans le cadre de la collecte de témoignages oraux auprès des anciens combattants marocains, un entretien avec M. Safdi Hammadi a été enregistré le 23 mars 2009 dans les locaux de l’association ALIFS. Vous trouverez un résumé synthétique de la première partie de cet entretien sur cette page, ainsi qu’une retranscription intégrale de cette première partie d’interview en cliquant sur bouton ci-dessous.

Retranscription intégrale

Résumé de l’interview

JOËL GUTTMANN – Qu’est-ce que vous faisiez avant d’être militaire ?

Quand j’étais jeune, j’étais agriculteur. Et en même temps je travaillais comme d’autres jeunes, à droite et à gauche… Je suis de la région de Rabat au Maroc, c’était la préfecture de Khémisset.

Et comment vous avez entendu parler de la possibilité de vous engager ?

C’était la fin de la guerre entre la France et l’Allemagne… Pour recruter, les Français prenaient un camion, ils rentraient dans le souk, dans les marchés, et annonçaient, « Si vous voulez entrer à l’armée, embarquez dans le car. Si vous voulez vous engager dans l’armée française, vous rentrez, voilà le car à votre disposition ». Alors je suis monté dans le car. La première année, ils m’ont dit que j’étais trop jeune. Mais l’année suivante, c’était bon ! Je suis allé à Kenitra, avant la ville s’appelait Port Lyautey, et j’ai été engagé pour quatre ans… Donc, le 15 juillet 1947, je suis rentré dans l’armée française.

Les jeunes qui sont rentrés dans l’armée française avant nous, ils étaient bien habillés, avec l’armement et tout ça… Nous, qu’est-ce qu’on va faire ? On va faire comme les autres !

J’étais très content de rentrer dans l’armée française ! À ce moment-là, on était jeune, on ne savait pas quoi faire de nos vies. Donc s’engager et être militaire ça pouvait être bon, ça ferait de nous des hommes. Ben on s’est engagé ! En plus, on voyait les jeunes qui sont rentrés dans l’armée française avant nous… Ils étaient bien habillés, avec l’armement et tout ça… Et donc on a eu envie de faire comme les autres.

Quelle a été la réaction de votre famille, de vos proches ?

Ma famille… mon père… on est parti sans le lui demander ! J’étais majeur, il n’avait rien à dire ! Il ne savait pas si j’étais engagé ou pas. Et si je ne m’étais pas engagé, j’aurais fait autre chose encore, pas de problème ! Un commerce, ou quelque chose comme ça, c’est obligé ! Un travail, mieux qu’agriculteur en tout cas… Mais comme on était jeunes, on ne savait pas comment faire. Alors on a décidé de s’engager dans l’armée française.

AZIZ JOUHADI – Mais si vous pouviez revenir en arrière, au moment de votre engagement, vous le refairiez ?

Je décide la même chose, je veux faire l’armée ! Je n’aurais pas changé pour faire civil. Je reste dans l’armée !

JOËL GUTTMANN – Quelles sont les grandes batailles ou les opérations que vous avez connues dans votre carrière ?

Alors, je suis rentré dans l’armée en 1947, et je suis ensuite parti à Madagascar. J’y suis resté deux ans… Ensuite, je suis parti de Madagascar et je suis rentré au Maroc ! J’ai passé… six mois ou un an, je ne sais plus, et ils m’ont envoyé en Indochine… J’ai passé deux ans et demi en Indochine… Quand l’armistice a été signé entre la France et les Vietnamiens, je suis rentré au Maroc. Et cette fois je suis parti pour l’Algérie ! 53, je crois… juste au retour de Mohammed V…

Beaucoup de neige en Allemagne. Et nous les marocains, on n’a pas l’habitude de la neige. C’était très difficile pour nous, et c’est ce qui nous emmerdait en Allemagne !

Bon, on a passé un an ou deux ans en Algérie, pendant la guerre. Ensuite, la France a eu des problèmes avec le Maroc et l’Algérie… À ce moment-là, il a été décidé que tous les soldats marocains devaient aller en Allemagne. Alors j’ai quitté l’Algérie et je suis allé en Allemagne pour continuer mon service… À ce moment-là, je suis passé sergent et j’ai eu donné une autorisation pour pouvoir ramener ma femme en Allemagne. J’ai donc vécu avec ma femme en Allemagne jusqu’en 1961, par là…

On va revenir un petit peu en arrière. Quel rôle vous occupiez ? Dans quel corps de l’armée étiez-vous ?

J’avais mes permis, toutes les catégories. Toutes les casernes que j’ai faites dans l’armée, je les ai faites dans le service auto… J’ai été chef de garage, j’ai été chef de service en dépannage, pour prendre les voitures, mécanique… Tout !

Et là-bas, qu’est-ce qui a été le plus dur pour vous ?

C’est la neige, « thalaj »… Beaucoup de neige, en Allemagne. Et nous les Marocains, on n’a pas l’habitude de la neige. C’est très difficile pour nous. Mais quand même, on était bien logé.

Et dans les autres endroits où vous êtes allé, Indochine, Madagascar, etc., vous n’avez pas de mauvais souvenirs ?

Non… En Indochine, à Madagascar, ou en Algérie, je n’ai pas eu difficultés. En Indochine ou en Algérie, j’étais chauffeur, et, en l’Allemagne, j’étais chef de section, j’étais responsable d’une quinzaine de chauffeurs au-dessous de moi… Et moi, j’avais une moto de dépannage Rien de très difficile… C’était un peu difficile quand on était jeune. Avant de passer le grade ou comme ça… on en a chié ! Mais sinon, ça va !

AZIZ JOUHADI – Est-ce que vous étiez mélangés avec les autres contingents étrangers ? Ou, par exemple, les Sénégalais restaient avec les Sénégalais, etc… ?

Non, on a été ensemble. Y’avait des Marocains, y’avait des Algériens, y’avait la légion, y’avait des Français aussi avec nous ! Mais les Français, ils n’étaient pas aux mêmes grades que nous. Par exemple vous aviez vingt-cinq Marocains ou vingt-cinq Algériens, et vous aviez cinq ou six français qui dirigeaient le travail et donnaient des ordres… Voilà le problème !

JOËL GUTTMANN – Mais quels ont été vos contacts avec la population civile, la population de chaque pays traversé ?

Ça se passait bien, mais, surtout au moment de la guerre, les civils avaient peur… Mais sinon, dans la ville comme ça, les civils étaient bien gentils avec nous. On leur parlait, en Indochine, ou en Allemagne, on discutait avec les civils, comme ici !

Il y avait des Français avec nous, mais ils ne faisaient pas les mêmes tâches ! Par exemple, il y avait 25 Marocains ou 25 Algériens, vous avez 5 ou 6 Français qui dirigeaient le travail…

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