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Les « Troupes Indigènes »

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Le terme « indigène » désigne de façon globale les populations des territoires colonisés par la France et soumises au Code de l’indigénat.

Dès le XVIIIe siècle, l’armée française lève des troupes supplétives en Amérique, aux Antilles, aux Indes ou en Afrique afin de renforcer celles chargées de protéger les premiers comptoirs. La conquête de l’Algérie, en 1830, voit ce recrutement s’intensifier avec la création des premières unités de tirailleurs (fantassins) et de spahis (cavaliers) algériens. Aux côtés des régiments créés en Tunisie (1881) puis au Maroc (1912), ceux de zouaves, de la Légion étrangère, des bataillons d’infanterie légère et de chasseurs d’Afrique, ils forment l’Armée d’Afrique.

En 1857, le premier bataillon de tirailleurs sénégalais naît à Saint-Louis du Sénégal, suivi de nombreuses autres formations en Afrique sub-sahélienne, puis en Indochine et à Madagascar. Avec les contingents des Vieilles Colonies et ceux du Pacifique, ils constituent l’Armée coloniale dite « La Coloniale ». Les premiers soldats indigènes sont recrutés parmi les esclaves en échange de leur affranchissement, parmi les guerriers qui viennent d’être capturés, ou encore par engagement volontaire ou de force. Représentant environ 70% des effectifs, les « indigènes » ont des cadres subalternes souvent issus de leur rang. En revanche l’encadrement en officiers et officiers supérieurs reste très largement européen. Formant outre-mer des troupes de souveraineté solides, ces unités sont aussi engagées par la France dans des conflits extérieurs comme la guerre de Crimée en 1854-1856 ou le conflit franco-prussien en 1870-1871.

Les dates clés pour comprendre

1622 : Sous le règne de Louis XIII, création des « Compagnies ordinaires de la mer » ou Troupes de Marine.
1765 : Création du corps des Laptots à Gorée (Sénégal) pour servir d’interprètes, de manoeuvres et de matelots.
1830 : Débarquement en Algérie du corps expéditionnaire français (14 juin) et création de l’Armée d’Afrique.
1841 : Création du 1er Régiment de tirailleurs algériens (RTA).
1857 : Faidherbe crée les Tirailleurs sénégalais.

« Il semble naturel d’utiliser les ressources militaires de nos colonies par le procédé le plus approprié à notre état et à notre politique, ainsi que l’ont fait avant nous tous les peuples colonisateurs, et en particulier les Romains. »

Lieutenant-colonel Charles Mangin,
La Force noire, 1910

« S’il en était besoin, nos colonies pourraient lever deux millions de soldats et cinq cent mille travailleurs. »

Georges Mandel, ministre des Colonies,
1939

Les tirailleurs sénégalais défilent dans Paris le 14 juillet, photographie, 1913

Tirailleurs indochinois, caserne de Lourcine, Paris, carte photographique, 1914

Le recrutement des « troupes indigènes » se poursuit de façon croissante, parallèlement à l’expansion coloniale de la IIIe République.

Des officiers, tels Mangin ou Pennequin, prônent même la constitution de Forces noires ou de Forces jaunes pour suppléer au déficit démographique de la France face à l’Allemagne sur les champs de bataille européens. Repris par la presse et la propagande coloniale, ces discours participent au mythe de colonies, immenses réservoirs d’hommes.

En réalité, à la veille de la Grande Guerre de 1914-1918, l’État-Major compte peu sur ces contingents. Aux problèmes d’acheminement et d’instruction s’ajoutent en effet ceux du statut politique et juridique de ces militaires, soumis au Code de l’indigénat. Pourtant, les enjeux du conflit vont inverser cette tendance et c’est par dizaines de milliers qu’ils seront enrôlés, comme le seront par ailleurs des milliers de travailleurs coloniaux.

Charles de Gaulle,

« Les mêmes moyens qui nous ont vaincus peuvent faire venir un jour la victoire. Car la France n’est pas seule ! Elle n’est pas seule ! Elle n’est pas seule !
Elle a un vaste Empire derrière elle. »

— Charles de Gaulle,
Radio de Londres, 18 juin 1940
Ce que nous devons à nos colonies, affiche signée Prouvé, imprimerie Berger-Levrault, 1918.
Trois couleurs, un drapeau, un Empire, affiche d’Éric Castel éditée par le secrétariat d’État aux Colonies, 1941.

 

Les dates clés pour comprendre

1879 : Création du 1er Régiment de tirailleurs annamites.
1895 : Création de l’AOF (Afrique-Occidentale française), réunissant la Côte d’Ivoire, la Guinée, le Sénégal et le Soudan (actuel Mali), la Mauritanie, le Dahomey (actuel Bénin), la Haute-Volta (actuel Burkina-Faso) et le Niger.
1895 : Création du 1er Régiment de tirailleurs malgaches (RTM).
1900 : Les Troupes de Marine deviennent les Troupes coloniales.
1910 : Création de l’AEF (Afrique-Équatoriale française), réunissant le Gabon, le Congo, l’Oubangui-Chari (actuelle Centrafrique) et le Tchad.
1912 : Protectorat de la France sur le Maroc.
1912 : Création des premiers Tabors marocains.
1914 : Constitution de deux régiments marocains pour le front français.
1919 : La France reçoit le Togo et le Cameroun, en partage avec les Anglais.
1920 : Mandats de la SDN (Société des Nations) confiés à la France sur le Liban et la Syrie.
1922 : Annexion de la Côte française des Somalis par la France.
1946 : Création de l’Union française, regroupant l’ensemble des colonies françaises, y compris les territoires
1956 : Indépendance du Maroc et de la Tunisie.
1960 : Indépendance des colonies d’Afrique subsahariennes et de Madagascar.
1962 : Indépendance de l’Algérie.