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Mustafa USTA

Travailleurs turcs de Nouvelle Aquitaine

Mustafa USTA
Mustafa USTA
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Les séquences

Interviewer : Hurizet Gunder
Lieu : Cenon (33150)
Date : 27 mars 2018

Présentation

Dans le cadre de la collecte de témoignages oraux auprès des travailleurs turcs de Nouvelle Aquitaine, un entretien avec Mr Mustafa Usta, avait été réalisé le 27 mars 2018, à Cenon (33150). Vous trouverez un résumé de cet entretien sur cette page, ainsi qu’une retranscription intégrale en cliquant sur bouton ci-dessous. 

Retranscription intégrale

Résumé de l’interview

Je suis né à Duzkoy près de Samsun sur les rives de la Mer Noire. Je vais à l’école jusqu’en deuxième année de collège. Puis, je deviens agriculteur. En parallèle, j’ouvre un commerce pour vendre les produits de ma ferme. Je me marie et nous avons cinq enfants. En 1965, alors que nos revenus sont trop faibles pour nous faire vivre, je décide de déposer ma candidature en tant que travailleur en Allemagne et en France.

En 1973, huit ans plus tard, je reçois l’acceptation de la France. Je gagne Istanbul pour prendre le train avec une dizaine d’autres travailleurs. Arrivé à Paris, je présente mes papiers à la police qui contacte mon employeur, une entreprise de transformation de caoutchouc, Hutchinson Mapa, filiale du groupe Total. Nous sommes conduits dans le train pour Besançon. A notre arrivée, nous sommes répartis par dizaine dans des bungalows de chantier. Le travail est extrêmement dangereux et pénible. Je dois poser dans des voitures du caoutchouc vulcanisé dans des moules à haute température : j’ai des plaies aux mains et aux bras. Je n’ai aucune formation.

En 1975, ma candidature à l’usine Peugeot de Sochaux près de Montbéliard est acceptée. J’y travaillerai 28 ans en tant que soudeur. Je travaille en horaires décalés et le week-end.

Durant huit ans, chaque année, je retourne en Turquie. Chaque voyage est très long et m’épuise. De plus, mes enfants grandissent. Ma petite fille, née après mon départ, ne me reconnaît plus. En 1982, avec la voiture d’un ami, je vais les chercher. Tous vont à l’école mais arrêtent précocement. Deux de mes fils s’installent à Bordeaux où mon cousin leur propose du travail. Mes filles les rejoignent ensuite. 

En 1996, je prends ma retraite. J’ai une pension de 1200 euros. Avec mon épargne, j’achète un appartement et deviens propriétaire. 

En 1998, à la suite d’un problème de santé – un nerf dorsal bloqué qui m’empêche de marcher et qui nécessite une opération – je décide de m’installer à Bordeaux avec mes enfants. Je m’intègre mal à cette nouvelle ville : l’ensemble de mon réseau social est à Besançon et il me manque. C’est une nouvelle coupure que je n’arrive pas à dépasser. Je n’ai jamais appris à parler français.

Je me rends chaque année trois mois en Turquie. Beaucoup de proches de ma génération sont décédés. Mais lorsque je regarde les champs, les routes, les ponts, les fleuves, j’éprouve un immense plaisir. Si ma migration en France était à refaire, je ne la recommencerai pas. J’ai eu un travail et du pain pour me nourrir, mais tant de problèmes. Un proverbe dit : “Mettez un oiseau dans une cage en or et il vous demandera toujours sa maison.

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Interviewer : Hurizet Gunder
Lieu : Cenon (33150)
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